1. Les différents modes de traitement
Aujourd’hui, le champ d'activité et de recherche en thérapie génique concerne exclusivement la thérapie génique somatique. Cette dernière consiste à introduire les gènes médicaments uniquement dans des cellules somatiques. La thérapie génique somatique repose sur la spécialisation des cellules de l’organisme, qui possèdent des fonctions qui leur sont propres : ainsi, une cellule du foie peut éliminer certaines substances toxiques (produites par l'organisme ou d'origine alimentaire, comme l'alcool) mais est incapable de fabriquer des anticorps, ceux-ci étant exclusivement fabriqués par les lymphocytes. Pour soigner une maladie héréditaire, il n'est donc pas nécessaire de corriger l’anomalie génétique dans toutes les cellules de l'organisme, mais simplement dans celles des organes touchés : ainsi, en cas de myopathie, maladie congénitale résultant d'une altération des fibres musculaires, la correction du défaut n'est nécessaire que dans les muscles.
Dans le cadre de l’élaboration d’un traitement de thérapie génique, il faut d’abord que les chercheurs retrouvent le gène responsable du dysfonctionnement des cellules. Pour cela, ils ont recours à différentes techniques de biologie moléculaire et de séquençage du génome, qui leur permettent de remonter de la protéine au gène correspondant, c’est-à-dire des chaînes d’acides aminées aux codons nucléotidiques.
Après avoir déterminé le gène en cause, différentes méthodes s’offrent aux chercheurs. Chaque maladie étant spécifique et due à des mécanismes qui lui sont propres, la thérapie génique déploie pour chacune une stratégie et des outils de traitement différents. Ainsi, chaque traitement est unique. On distingue plusieurs modes de traitement :
a) In vitro, les chercheurs utilisent un gène fonctionnel pour produire la protéine en grande quantité puis injectent celles-ci aux cellules. Pour cela, ils ont recours aux plasmides bactériens, intéressant du fait de la rapidité de leur réplication. Cependant, cette technique est limitée car certaines maladies nécessitent que la cellule elle-même soit traitée.
b) Les chercheurs introduisent dans l’organisme un gène fonctionnel, appelé transgène :
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Ex vivo (in vitro) : c’est la méthode la plus utilisée, elle consiste à prélever des cellules du patient et à y insérer le transgène pour ensuite les réintroduire dans l’organisme du malade, après multiplication des cellules. Celles-ci vont se multiplier, contribuant à soigner le patient. L’avantage de cette méthode est la modification de cellules identifiées, évitant le risque que le transgène s’insère dans d’autres cellules de l’organisme. On utilise souvent cette méthode dans le cas de maladies monogéniques affectant les cellules sanguines.
Schéma: exemple d'un traitement ex vivo, cas des bébés bulles
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In vivo : injection du transgène dans la circulation sanguine ou directement dans l’organe cible, on parle alors de thérapie génique in situ. Cette méthode est particulièrement utilisée pour les cellules cardiaques et les neurones, elle présente toutefois un risque de dissémination du transgène moins maîtrisée. Ce mode de traitement est particulièrement utilisé pour soigner l’amaurose de Leber, une dégénérescence rétinienne provoquant la cécité, ainsi que les patients atteints de mucoviscidose. Le transgène est directement injecté, respectivement dans la rétine ou la trachée et les bronches des malades.
Schéma des traitements in vivo et ex vivo
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Une autre approche de thérapie génique est le « saut d’exon », une technique s’apparentant à une chirurgie du gène. Elle consiste à faire produire par les cellules ciblées des protéines plus courtes que celles normalement fonctionnelles (mais déficientes chez le patient). Pour cela, la partie du gène (exon) codant pour la protéine portant la mutation à l’origine de la maladie est « sautée ». Cette méthode est utilisée notamment pour traiter la myopathie de Duchenne. Cette myopathie due à une anomalie du gène DMD provoque une dégénérescence progressive de l’ensemble des muscles de l’organisme. Ce gène étant trop grand pour être transporté dans l’organisme, la technique du « saut d’exon » est alors très adaptée.
Schéma de la technique du saut d'exon
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Une dernière méthode consiste à réparer le gène défectueux directement dans la cellule, in vivo. Elle présente l’intérêt d’une grande précision, évitant les effets indésirables dus au transfert du transgène. Cette approche requiert l’utilisation d’enzymes, les « nucléases », qui font partie des systèmes de réparation de l’ADN. En effet, elles ont la capacité de repérer les séquences d’ADN porteuses de la mutation et de les éliminer. L’ADN polymérase peut alors réparer la molécule d’ADN en rajoutant les nucléotides manquants par complémentarité avec le brin opposé. Les scientifiques délivrent alors une copie « saine » du gène à réparer, qui sert de matrice de réparation, permettant ainsi la reconstitution d’un gène fonctionnel.
Aujourd’hui, de plus en plus de traitements de thérapie génique sont dévolus à la lutte contre le cancer. Contrairement aux traitements « classiques », ces traitements ne cherchent pas à remplacer des gènes défectueux par une copie « saine » mais à détruire les cellules cancéreuses, en les repérant parmi les cellules saines. On parle de « gène suicide ».


